Sandie Bélair juillet - 22 - 2013
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Pour faire écho aux Histoires courtes en Thérapies Avec le Cheval écrites, principalement, par Brigitte, nous lançons Les histoires courtes en thérapies avec le chien!

© Photo Association Résilienfance

 

Dans le cadre d’un atelier thérapeutique avec le chien, je suis amenée à rencontrer Arthur, un enfant de 8 ans présentant un syndrome d’Angelman. Au cours de l’année, la prise en charge d’Arthur m’a beaucoup interrogée et m’a obligée, plus qu’à l’accoutumée, à revoir ma pratique et les séances que je lui proposais.

Pour ma part, je suis d’abord psychologue/psychothérapeute et j’intègre ensuite l’animal dans mon travail. Mon but, notamment, dans le cas de certaines prises en charge est d’instaurer un espace potentiel propice au jeu (nécessite déjà un accès au symbolique) et l’animal est un partenaire précieux ! Ainsi, il arrive que l’animal soit juste un prétexte à la rencontre et que ce dernier dorme toute une séance pendant que je parle, je « joue », je « dessine » (au sens thérapeutique, vous l’avez compris) avec l’enfant ou le jeune. L’animal vient parfois intégrer nos jeux, il peut être le support de réflexions, d’échanges ou encore un soutien affectif dont il faut prend soin.

Dans ma pratique donc, il n’y a pas un atelier ou une prise en charge identique ; les séances sont adaptées au plus près des besoins du bénéficiaire, de ses possibilités, de son désir, de son plaisir… mais également ajustées en fonction des réactions de notre « médiat » : l’animal en l’occurrence ici le chien. Alors certes, certaines prises en charge nous mettent davantage en difficultés, elles nous obligent à nous remettre en question, à perdre un peu le contrôle… pour laisser venir l’essentiel…

Proposer un espace de rencontres : oui mais un espace pensé, contenant, adapté et réajusté en permanence et en fonction des nécessités… il important aussi d’accepter de lâcher-prise, de faire confiance au bénéficiaire et à l’animal !

Aujourd’hui, j’ai souhaité vous faire partager un peu le travail avec Arthur… car, dans ces rencontres, j’avais beaucoup d’appréhensions pour mon chien que je veux préserver… finalement vous vous rendrez compte que lâcher-prise pour le thérapeute a du bon ! Et est essentiel ! Un beau cas d’école !

Cet écrit ne constitue pas une étude de cas, ni un bilan, je viens juste vous décrire la situation, les séances et ma démarche !

LE SYNDROME D’ANGELMAN

Le syndrome d’Angelman est un trouble sévère du développement neurologique dont l’origine est génétique.

C’est un pédiatre Britannique, le docteur Harry Angelman, qui, dès 1965, a le premier décrit les symptômes du syndrome qui porte aujourd’hui son nom.

La maladie est caractérisée par une déficience mentale plus ou moins sévère, et une apparence et un comportement caractéristiques. C’est une maladie génétique rare liée à la perte de fonction d’un ou plusieurs gènes de la région 15q11-q12 d’origine maternelle.

Le syndrome d’Angelman est défini par des critères diagnostiques, certains constants, d’autres plus ou moins fréquents. Comme dans tous les syndromes génétiques, il existe des variations cliniques et des degrés de gravité, en particulier en ce qui concerne les capacités du langage et de communication, la motricité, les crises épileptiques. Ces variations de sévérité dépendent en grande partie des différents types génétiques, les formes avec délétion ayant le plus souvent le tableau clinique le plus complet.

Les signes constants (100% des cas) :

• Une déficience mentale d’intensité variable, associée à un retard du développement moteur, une hyperactivité et une quasi-absence de langage.

• Une capacité d’attention faible, une démarche raide et saccadée et des traits comportementaux particuliers avec sourires et rires très faciles, une hyperexcitabilité se traduisant par un battement des avant-bras et une hyperactivité.

Les signes fréquents (plus de 80% des cas) :

• Une épilepsie de gravité variable qui débute le plus souvent avant l’âge de trois ans.

• Des myoclonies (petites secousses des mains donnant l’impression d’un « tremblement » variable) associées à des anomalies de l’électroencéphalogramme.

• Des troubles du sommeil.

Les signes associés (dans plus de 50% des cas) :

• Des traits particuliers du visage (bouche large avec dents supérieures écartées et lèvre supérieure fine, protrusion de la langue avec bavage fréquent)

• Un strabisme et une hypo pigmentation de la peau, des cheveux et des yeux.

• Une tendance à l’obésité ainsi que des problèmes de scoliose peuvent apparaître à l’adolescence.

Pour en savoir plus, je vous conseille de vous rendre sur le site de l’Association Française du Syndrome d’Angelman

 

© Photo Association Résilienfance

LA PRISE EN CHARGE D’ARTHUR

Lors des premières rencontres avec Arthur, aucune activité n’avait été prévue. Il s’agissait de laisser-faire, d’accompagner la rencontre et d’observer. Nous avons proposé à Arthur de faire connaissance avec le chien, à distance, dans un premier temps, car nous avions noté une très grande excitation à l’approche de l’animal. Petit à petit, nous avons réduit cette distance mais Arthur restait toujours dans son fauteuil.

Bien que très agité, Arthur a pu toucher le chien du bout des doigts mais également attraper les poils de l’animal à pleine main ou le museau et tirer à lui. A chaque rapprochement, l’animal était malmené. Les élans à l’interaction nécessitaient donc d’être très encadrés afin de préserver le bien-être de l’animal et de favoriser le plaisir dans la relation. Il était très difficile d’être dans une interaction libre.

Puis, Arthur s’est montré très en demande pour donner des croquettes au chien.

Les offrandes occupaient toutes les séances. Arthur se montrait alors très adapté et calme. Et, seule, il offrait du bout des doigts une croquette. Malgré une certaine crispation lors de ce geste, son visage se détendait et montrait du plaisir lorsqu’il réalisait sa réussite. L’émotion générée produisait une grande agitation. Il était donc nécessaire à ce moment de mettre de la distance ; ce qui permettait à Arthur de s’apaiser. Mais il lui était difficile de répéter ce geste.

Son éducateur référent avait alors un geste, un rôle précieux et bénéfique qui l’aider à se canaliser. Il lui proposait de l’accompagner mais en donnant la croquette avec la main à plat. Là encore, des appréhensions et beaucoup d’émotions ont été observées mais un réel plaisir et des sensations appréciées et partagées. Cet accompagnement l’a aidé à s’apaiser et à prendre confiance.

Le jeu du ballon a été également possible en alternant rapprochement et éloignement.

Les premières séances ont permis de tisser un lien et d’envisager de nouvelles modalités relationnelles. Toutefois, il semblait nécessaire de se laisser le temps afin de préserver l’animal et de ne pas mettre en échec cette première relation. Les ateliers avec Arthur ont donc été axés à la fois sur des interactions proches et sur des interactions à distance (jeu de ballons, croquettes, attention, regards, caresses).

Arthur semblait apprécier les rencontres avec Dubaï ; il était dans l’attente chaque semaine.

Le travail au sol, à notre sens, ne pouvait être envisagé afin de préserver l’animal. Mais j’avais comme l’impression de manquer quelque chose, de ne pas proposer une rencontre pertinente même si un certain nombre d’éléments étaient positifs et que des effets apparaissaient. Je craignais une lassitude pour Arthur et Dubaï, Arthur très frustré de rester dans son fauteuil tirait de plus en plus les poils de l’animal et ce dernier commençait à fuir la relation.

Nous avons envisagé d’arrêter, toutefois, avant, il nous a semblé pertinent de proposer à Arthur de descendre du fauteuil en laissant le chien à l’écart et d’observer ce qu’il se passait. En fonction, une interaction plus libre avec Dubaï serait peut-être possible.

En parallèle, je recensais, dans la vie quotidienne, ce qui mobilisait et intéressait Arthur et ce qui l’apaisait et ce dans le but de transférer cela sur les ateliers avec le chien.

 

© Photo Association Résilienfance


Lors de cette nouvelle rencontre, Arthur prend spontanément la laisse du chien et signifie son envie de sortir, son éducateur me précise alors qu’Arthur aime marcher, être à l’extérieur et qu’il est d’ailleurs beaucoup plus calme. Au cours de cette même séance, Arthur prend mon écharpe et se cache derrière. J’apprends alors qu’il adore se cacher. Voilà ce qui me manquait…

C’est ainsi qu’à la séance suivante, nos nous retrouvons à l’extérieur. Arthur est ravi et Dubaï également. Il tient en laisse le chien qui s’adapte à ses déplacements. Il peut lâcher la laisse quand un élément extérieur l’accapare mais il revient vers l’animal. Le chien reprend confiance dans la relation et le sollicite pour des caresses ; ce qu’il fait, il rit mais son excitation est plus contrôlée. La proximité est possible.

Les séances se sont donc poursuivies à l’extérieur avec notamment le jeu du cache-cache (permanence de l’objet) : je me cache avec le chien; Arthur et son éducateur nous cherchent ou ce sont eux qui se cachent, et nous devons les retrouver.

Au fil du temps, Arthur est de plus en plus à l’aise. Nous nous retrouvons dans la salle d’activités du départ puis nous descendons dans le jardin. Arthur ne vient plus en fauteuil, il marche. Dès son entrée dans la salle, il va seule dans mon sac chercher des croquettes et en offrir au chien (pour le grand bonheur de ce dernier). Puis il prend la laisse et nous partons « jouer » à l’extérieur.

Offrandes, jeux, caresses, élans à l’interaction, comportements affiliatifs, rires, plaisir sont au centre de ces rencontres. Accompagnées par des professionnels, elles permettent de mettre à jour un nouveau mode relationnel pour Arthur. Il est beaucoup moins agité, il ne tire plus les poils du chien, il ne donne plus de coups de pieds. Et nous notons même une belle complicité entre lui et Dubaï, entre lui et les professionnels.

Preuve qu’il n’y a ni « chien thérapeute », ni « baguette magique » mais des professionnels, avec un « médiat » précieux, garants du cadre de la médiation thérapeutique. Car cette dernière est avant tout une expression de soi engageant la globalité du bénéficiaire et sa créativité.

Et vous? Proposez-nous VOS Histoires Courtes en Thérapies Avec le Chien…

Sandie BELAIR

5 Responses to “Histoires courtes en Thérapies avec le Chien # 1: Arthur!”

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    laetitia
    septembre 17th, 2013 at 18:42

    Un grand MERCI Sandie pour ce partage, c’est toujours quelque chose de génial ces partages d’expériences vécues, ça nous parle… Merci du temps pris pour écrire et partager 🙂

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    Céline
    mars 18th, 2014 at 19:29

    Superbe expérience… Cela me parle évidemment surtout que je pense connaître Arthur!!! Merci Sandie, et félicitations pour cet écrit!!!:)

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    Sandie Bélair
    mars 25th, 2014 at 10:27

    Merci Céline 😉

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    rigal lionel
    juillet 10th, 2017 at 11:22

    Merci pour cette page de partage de rencontres et de liens. Je suis moi-même éducateur en maison d’enfants placés par le juge des enfants et je me posais des questions sur le bien fondé d’un tel atelier avecdes jeunes avec un vécu de carences affectives. J’ai ma réponse même si des questions d’organisations se posent à moi. Le soin dans le prendre soin est -elle une possibilité du prendre soin de soi? Voila maa grande question
    Au plaisir de se parler par mail et d’en débattre
    Lionel R

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    Sandie Bélair
    juillet 18th, 2017 at 16:04

    Bonjour Lionel! Ma réponse est oui mais cela mériterait un article voir même beaucoup plus. Je vous conseille la lecture du livre de Jérôme Michalon « Panser avec les animaux: http://www.mediation-animale.org/panser-avec-les-animaux-de-jerome-michalon/
    A bientôt
    au plaisir de vous lire

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