Sandie Bélair octobre - 30 - 2013
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Métro, boulot, dodo… et… « ronronthérapie » !

Paris s’offre à l’image des villes japonaises son premier bar à chats! Alors non, Matou ne monte pas la garde, Matou ne sert pas votre tasse de thé, Matou n’est pas à la caisse mais Matou vous honore de sa présence et participe à votre détente! Vous pouvez ainsi siroter un thé d’une main et caresser Matou de l’autre… Oui mais…

LE CONCEPT PARISIEN « BAR A CHAT »

En septembre dernier, Margaux GANDELON, jeune entrepreneuse de 26 ans a ouvert le premier « Café des chats » français, en plein centre de Paris dans le Marais. Une idée puisée à partir du concept japonais: « Neko Café » développé à la fin des années 90. Au pays du soleil levant, près d’une centaine d’établissements existent déjà. Fort de leurs succès, la réglementation leur impose depuis peu de fermer à 20h afin d’éviter la surexposition des animaux.

Pour Margaux GANDELON: « Le terme « bar à chats » qu’on utilise beaucoup n’est pas vraiment approprié pour le lieu que nous avons créé. Il s’agit plutôt d’un salon de thé, un espace de détente et de relaxation autour des félins. »

Son projet a vu le jour via internet, grâce à un appel aux dons. Elle a récolté plus de 40.000 euros via une plateforme de crowdfunding, et plus de 600 personnes ont participé en faisant un don ou en réservant le lieu pour une privatisation. Pari réussi pour la jeune femme qui est saturée de demandes et qui a dû refuser 300 personnes le jour de l’ouverture!

 

 

Mais l’initiative n’est pas du goût de certains militants de la cause animale, comme la Fondation Brigitte Bardot. « Le problème qui se pose, c’est de considérer qu’un chat est une peluche, est là pour amuser des clients « , dénonce son porte-parole Christophe MARIE. « Par son comportement, un chat a besoin de solitude et là ce n’est pas ce qu’il y a de mieux pour un animal qui n’aime pas forcément se faire tripoter toute la journée. »

Reha HUTIN, présidente de la Fondation 30 millions d’amis, s’interroge aussi sur le bien-être animal: «Qui s’occupera des chats et dans quelles conditions en dehors des heures d’ouverture de l’établissement?»

Le bien-être des chats semble avoir été pensé en lien avec des vétérinaires et des associations de protection animale. Les chats ont tous été sélectionnés et adoptés dans des refuges: nos chats.

Margaux GANDELON assure que tout a été prévu pour le bien-être de ces 12 chats. Chaque serveuse est responsable de trois chats. Quant aux clients, ils sont avertis que les chats doivent être initiateurs du contact et qu’il ne faut pas les déranger durant leur sieste ou encore les prendre dans les bras. Toutefois, il semble difficile de réfréner les envies des petits parisiens qui voient se mouvoir , de si près, les matous.

Mais, la création de tels lieux interrogent forcément sur les rapports homme-animal et sur le bien-être animal.

Alors sur quoi surfe réellement ce concept???

L’EFFET RONRONTHERAPIE?

C’est Jean-Yves Gauchet, vétérinaire à Toulouse qui revendique en France la paternité de la « ronronthérapie », le ronronnement du félin « apaise et agit comme un médicament sans effet secondaire. » Selon lui, « quand l’organisme lutte contre des situations pénibles – stress, insomnie ou anxiété – le ronronnement du chat émet des vibrations sonores apaisantes et bienfaisantes, un peu comme la musique. C’est par le tympan, mais aussi les corpuscules de Pacini, des terminaisons nerveuses situées au ras de la peau, que nous percevons le ronron qui émet des fréquences basses, entre 20 et 50 hertz. Des pensées positives et de bien-être sont alors transmises à notre cerveau « , explique-t-il.

Et à la question « Qu’apportent les chats en plus dans un salon de thé? « , Margaux GANDELON nous renvoie vers un article du Monde.fr intitulé « la ronronthérapie,  pour reprendre du poil de la bête « . Il est tout à fait, hors de propos, de parler de « ronronthérapie » dans les bars à chat; le cadre ne s’y prête pas et la démarche n’est pas celle-là. Toutefois, il est évident qu’avec la vulgarisation de la « ronronthérapie » dans de nombreux médias et le retour vers Dame Nature  la plupart des personnes a en tête que la présence des chats peut être apaisante et bienfaisante, et un grand nombre de nos concitoyens sont donc séduits par ces cafés pas comme les autres!

Le rythme des grandes villes, le stress, le quotidien, « le métro, boulot, dodo », l’impossibilité pour certains de prendre un animal de compagnie (manque de temps et d’espace) sont autant de raisons qui attirent les parisiens dans ce lieu décrit comme cosy. Alors un remède au stress pour les citadins mais comment les chats peuvent-ils vivre cela? Quel est leur niveau de stress? Les chats comme objets de notre bien-être?

 

Ces questions, nous nous les posons sans cesse, nous, acteurs de la médiation animale et notre démarche s’inscrit dans un grand respect de l’animal et de son bien-être. Tout acteur sérieux de la médiation animale travaille en lien avec des professionnels du monde animal, apprend « à lire » son animal et à faire en sorte qu’il soit bien dans sa tête et ses pattes, et surtout n’hésite pas à mettre fin à un programme si l’animal est en mal-être.

Mais comme le rappelle très justement, Jérôme Michalon, sociologue et chercheur au Centre Max Weber à Saint-Etienne, dans un article de Libération.fr: « ce n’est pas parce qu’il y a « objectification » qu’il y a dégradation de l’animal « . Par contre, si l’animal est là pour attirer ou appâter le client, on peut, selon lui, dire que « la relation de base humain/animal est mercantile » et que le chat est donc « public « . Car en effet, il ne s’agit pas ici de changer la litière de matou, de le nourrir ou autres mais de l’observer et de le caresser!

L’AVIS DE NOTRE EXPERT: ALAIN WEISS

Alain WEISS est vétérinaire et comportementaliste-médiateur pour animaux de compagnie, il est également responsable de la formation EAPAC en comportement animal.

A la lecture d’un article qui présente « Le café des chats« , Alain WEISS réagit rapidement aux propos d’un représentant d’une association de protection animale qui a remis deux des chats présents au café: « On les a choisies parce qu’elles ont plus d’espace dans le café et elles ne seront pas seules ». Selon lui, l’intérêt et le bien-être des animaux n’a pas été le « moteur » du projet et  ils ne sont pas correctement pris en compte dans la mise en place de ce nouveau concept. Pourquoi ? « Parce que ce n’est pas bien connaître les chats que de vouloir les aider à ne pas rester seuls. Le chat n’est pas à proprement parler un animal social. Il est davantage comme on le qualifie souvent  » Un chasseur solitaire ». Rien de plus stressant pour un chat qu’un congénère avec lequel il ne s’entend pas…et c’est loin d’être rare ».

Néanmoins si l’on se place du point de vue des chats: « j’imagine que pour un animal qui aurait le choix entre vivre une vie entouré de barreaux, comme dans un refuge, sans possibilité d’assouvir les fonctions essentielles de son espèce et tout particulièrement celle de se mouvoir en liberté, de chasser ou au moins de mimer des comportements de chasse ce qui lui permet un équilibre psychique indispensable, et bien je pense bien sûr que le choix coule de source : il préfèrerait son « bar » à chats « .

 

 

Mais Alain WEISS rappelle que les choses ne sont pas si simples. Qu’a besoin de faire un chat? « Jouer, chasser, courir mais, et c’est une donnée importante, ne pas être « stressés. » Et là, quand on sait que certains animaux, vivant en appartement, manifestent une grande anxiété quand des étrangers viennent rendre visite à leurs maîtres, quand des travaux ont lieu (va-et-vient de personnes étrangères, bruits inhabituels, etc..) en résumé quand ils sont « dérangés » dans leurs habitudes, on se demande quelle réaction psychologique pourra bien « animer » le cerveau des chats déambulant librement dans ce bar mais soumis à des bruits constamment différents, à des inconnus renouvelés sans cesse et à des situations non ritualisées. »

Qu’est-ce qui pourrait faciliter leur bien-être dans une telle situation? « Si l’on veut malgré tout aider ces chats à s’intégrer dans ce milieu il va falloir leur réserver un espace de tranquillité, une sorte d’aire de repos accessible à tout moment. Il leur faudra également voir leurs litières vidées et nettoyées régulièrement avec toutes les précautions hygiéniques nécessaires pour préserver une non contamination humaine par des parasites digestifs. En résumé pour qu’un chat puisse être adopté par ce bar en toute confiance il lui faudra tout cela plus une personnalité équilibrée peu encline à l’anxiété. C’est difficile mais c’est possible. »

Quant au plan humain, « c’est assurément pour moi une conception dont l’origine est essentiellement mercantile et marketingmais pourquoi la repousser si tout le monde y trouve son compte ? » et si les conditions du bien-être animal sont réunies!

Des bars à chat possibles à condition que l’intérêt et le bien-être des animaux soit le « moteur » du projet et  qu’ils soient correctement pris en compte dans la mise en place de ce nouveau concept?

Et vous qu’en pensez-vous? Avez-vous fréquenté ce bar à chats? Venez nous donner votre avis, réagir, bref participez au débat…

Sandie BELAIR

+++ Liens:

Le café des chats

La page facebook Le café des chats

La ronronthérapie,  pour reprendre du poil de la bête

Des chats, de gouttière en comptoir

EAPAC – Formation Comportementaliste Animaux de Compagnie

5 Responses to “Le café des chats… What else?”

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    RIDARD
    octobre 31st, 2013 at 10:47

    Café à chats pourquoi pas si l’issue donne un « foyer » à des chats de refuge mais sous très haute surveillance vétérinaire : soins et analyse de la réponse du comportement des chats dans ce cas de figure et surtout avec un(e) gérante formé(e) à l’éducation de l’espèce humaine vis à vis des chats dans ce contexte : Ouverture de Café à chats autorisée sur délivrance d’un agrément portant sur cette éducation, Association obligatoire avec un Vétérinaire comportementaliste
    l’Entreprise doit faire l’objet d’un encadrement clairement établi dans le respect en premier de l’animal mais aussi de l’approche humaine : pas de n’importe qui n’importe comment pour simplement faire de l’argent
    Ne pas négliger de créer une législation à la faveur des Chats dont il est ici question et d’en répandre les critères partout ou cela se pratique et de sanctionner les abus pour de ne pas arriver à l’interdiction

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    Marie
    novembre 1st, 2013 at 12:25

    Il va falloir que j’aille tester;)
    Il parait qu’il cartonne!!!

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    Soraya
    novembre 24th, 2013 at 9:46

    Bonjour,

    J’ai visité le café et je pense que les chats sont complètement à l’aise dans ce espace. De toute façon, et si jamais ils ont besoin de solitude, ils ont accès à une salle séparée où les clients ne peuvent pas entrer. Cet article l’explique en détail: http://www.gateauxenespagne.com/2013/11/le-cafe-des-chats.html

    Dans tous les cas, je suis d’accord avec vous: il ne faut pas négliger le bien-être des animaux. À bientôt

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    diane
    décembre 22nd, 2013 at 8:56

    Je n’ai pas consommé au café des chats, je suis contente que tout les commentaires s’inquiètent du bien être des chats..
    J’ai envie d’ajouter que l’idée de faciliter la rencontre avec les chats, avec le succès qui semble se manifester, signe bien que les modes de vie en milieu urbain souffrent de l’absence d’animaux et que cette initiative est un moyen de retrouver le rythme et les besoins naturels du chat, mais peut être aussi de l’humain. Le chat sait transmettre une autre temporalité et la notion du désir de relation avec une attention à l’autre. J’espère que le visiteur aura été initié au respect des particularités de comportement du chat avant de s’aventurer dans le « café des chats » ….

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    Chaton
    janvier 13th, 2014 at 11:51

    J’ai été au café des chats avant-hier et j’ai été très déçue. Si effectivement les chats ont des arbres où se reposer, je les ai vus se faire embêter par des petites filles qui n’arrêtaient pas d’aller les caresser pendant qu’ils essayaient de dormir. Certes les petites filles ne savaient certainement pas qu’elles les dérangeaient ainsi. Mais les parents ne sont pas intervenus, ni les serveurs d’ailleurs. Des adultes aussi ne se gênaient pas pour porter des chats (alors que le café l’interdit, soit-disant) et pour les tripoter pendant qu’ils dorment. Il semble que la plupart de ces clients ne se doutent pas des besoins de tranquillité qu’on les félins. Et n’imaginent pas une seconde à quel point ça doit être chiant de subir ça 50 fois par jour. Cet anthropocentrisme m’a beaucoup dérangée. Je pense qu’une personne dédiée à la surveillance des personnes vis-à-vis des chats serait bienvenue.

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