Nicolas Perez juin - 16 - 2009
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Nous sommes souvent très enthousiastes à l’idée de partager un article de journal qui a été consacré à notre activité. Néanmoins, je me dois d’attirer votre attention sur certains risques liés à cette communication. Je vais tenter de vous dresser le plus clairement possible le cadre juridique de celle-ci.

L’utilisation et la diffusion d’une « œuvre » et notamment d’un article de journal, d’une page Internet sur un autre site Internet ne sont pas libres1 . Le Code de la Propriété Intellectuelle édicte un ensemble de règle que je vais tenter de vous exposer.

I. Les éléments protégés

La présentation sur un site Internet entraine la mise en concurrence :

– d’éléments non protégés car non constitutifs d’œuvres originales

– des œuvres protégées par le droit d’auteur (un site internet peut être considéré comme une œuvre2

– des prestations d’auxiliaires de la création bénéficiaires de droits voisins3 du droit d’auteur (artistes-interprètes, producteurs de phonogrammes ou de vidéogrammes, entreprises de communication audiovisuelle).

– des œuvres tombées dans le domaine public4

L’utilisation d’œuvres et de prestations protégées par le droit d’auteur et les droits voisins exige l’obtention du consentement préalable des titulaires de ces droits.

La délivrance de l’autorisation  peut se faire par l’intermédiaire des sociétés de gestion collective5 lorsque la gestion des droits leur a été confiée.

II. Les autorisations à demander

Deux degrés de protection s’appliquent sur les droits en jeu.

A – Les droits patrimoniaux

Pour utiliser (exploiter) une œuvre (article de journaux ou autres), certains droits patrimoniaux doivent être respectés à savoir :

– le droit de reproduction c’est-à-dire toute fixation matérielle de l’œuvre (numérisation, stockage sur le serveur, téléchargement, enregistrement sur le disque dur de l’utilisateur). Donc rendre accessible au public, via un site, un article est une reproduction

– le droit de représentation c’est-à-dire mise à la disposition du public sur un site internet.

– le droit d’adaptation (exemple : traduction dans une langue étrangère).

Par conséquent, dans toutes ses hypothèses UNE AUTORISATION de l’auteur ou de ses ayants droits.

EST NECESSAIRE !!!

B – Les droits moraux

Indépendamment des droits patrimoniaux, l’utilisation des œuvres, y compris celles qui sont tombées dans le domaine public, reste subordonnée au respect du droit moral de l’auteur et en particulier :

– le droit au nom : sur Internet, la citation du nom de l’auteur d’une œuvre doit apparaître clairement et être associée à l’œuvre elle-même de la manière la plus étroite possible.

– le droit au respect : Le droit au respect permet à l’auteur d’une œuvre de contrôler toute modification qui nuirait à l’intégrité matérielle de cette œuvre ou encore d’interdire l’exploitation de son œuvre dans un contexte qui en trahirait l’esprit (exemple d’une peinture insérée sur un site dont le contenu présente un caractère illicite).

III. Les exceptions au droit d’auteur

L’article L 122-5 du code de la propriété intellectuelle permet des utilisations sans autorisation dans quelques hypothèses. Les principales sont :

– les reproductions et représentations effectuées à usage privé au sein du « cercle de famille »

– les courtes citations

– les revues de presse

– les discours

A – Reproduction et représentation

Précisons cette notion qui permet d’échapper « au monopole de l’auteur ». Le caractère public de la représentation commence dès lors que se rompt l’intimité du cercle familial ou d’amis.

Le cercle de famille est une notion qui doit s’entendre de façon restrictive et concerner les parents ou amis très proches, qui sont unis de façon habituelle par des liens familiaux ou d’intimité.

Donc ne permettent pas d’échapper au « monopole » : la gratuité de la représentation; la transmission via internet d’une œuvre à un correspondant qui n’est ni un membre de la famille ni un ami ; l’usage sur un réseau interne d’une entreprise ou d’un forum ; etc.

B – Citations

Peuvent être autorisées les « analyses et courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information de l’œuvre à laquelle elles sont incorporées ».

Les analyses et citations doivent être courtes et ne pas dispenser les utilisateurs de recourir à l’œuvre première. Leur licéité est en outre subordonnée à la condition que soient indiqués clairement le nom de l’auteur et la source. Cette condition vise à préserver le droit à la paternité de l’auteur de l’œuvre citée.

La reproduction intégrale d’une œuvre, quel qu’en soit le format ne peut s’analyser en une courte citation.

Si la reproduction porte sur l’intégralité d’une œuvre, elle ne peut être assimilée à une courte citation. L’usage de l’exception de courte citation en matière musicale est subordonnée à la mention du nom de l’auteur et de la source, condition sine qua non de la dispense du consentement de l’auteur.

Pour les œuvres d’art graphiques ou plastiques, l’exception de citation impose de veiller au respect de l’intégrité de l’œuvre.

C – Revues de presse

La reproduction sur un support numérique d’articles de presse sans le consentement des ayants droit aux fins de diffusion sur internet n’est pas une exception au droit de reproduction prévue pour les revues de presse par l’article L 122-5 3° b) du code de la propriété intellectuelle.

En effet, les articles de journaux présentent un caractère d’originalité et sont protégés par le droit d’auteur en tant qu’oeuvres littéraires. Par conséquent, la reproduction et la transmission sur internet d’articles de journaux nécessitent en conséquence l’accord préalable des auteurs.

D – Discours destinés au public

En application de l’article L 122-5 du code de la propriété intellectuelle, peuvent être diffusés librement, à titre d’information d’actualité, les discours destinés au public prononcés dans les assemblées politiques, administratives, judiciaires ou académiques ainsi que dans les réunions publiques d’ordre politique et les cérémonies officielles.

Attention à la notion d’actualité, un discours prononcé il y a plus de 5 ans par exemple n’est plus d’actualité…

IV. Les sanctions encourues

Les infractions aux droits d’auteur sont sanctionnées :

– pénalement (CPI, art L.335-1 à L.335-10) – exemple: délit de contrefaçon6 punie d’une peine de 300.000 euros d’amende et de 3 ans d’emprisonnement et peuvent être appliquée des peines complémentaires: fermeture d’établissement, confiscation, affichage de la décision judiciaire …
– civilement: possibilité de demander des dommages et intérêt encourus pour le préjudice subi.
Durée de la protection : l’Article L.123-1 du CPI : « L’auteur jouit, sa vie durant, du droit exclusif d’exploiter son œuvre sous quelque forme que ce soit et d’en tirer un profit pécuniaire ». « La protection persiste au profit de ses ayants droit pendant l’année civile en cours et les soixante-dix ans qui suivent la mort de l’auteur ». À l’expiration de ce délai, l’œuvre tombe dans le domaine public (sauf exceptions ayant peu d’intérêt pour ce billet)

Nicolas

En savoir plus :

http://www.cspla.culture.gouv.fr/

  1. Synthèse issue des documents proposés et mis en ligne par la Conseil Supérieur de la propriété littéraire et artistique : http://www.cspla.culture.gouv.fr []
  2. « seule une création de forme originale peut bénéficier d’une protection par le droit d’auteur. Une page-écran, un graphisme, une animation ou l’arborescence d’un site peut constituer une d’œuvre de l’esprit sous réserve qu’il constitue une création de forme originale. Le critère de l’originalité, apprécié par le juge, s’entend de l’empreinte de la personnalité de l’auteur. Ainsi un assemblage de textes, de dessins ou photographies, de sons et de liens hypertextes doit-il révéler l’empreinte de la personnalité de son auteur pour donner prise au droit d’auteur. La jurisprudence a notamment reconnu l’originalité d’une maquette de revue, en considération du choix de la typographie, des couleurs, du positionnement du logo, de l’agencement des articles ou de l’utilisation d’encarts sur fond de couleur . » []
  3. « En ce qui concerne les droits voisins, les droits patrimoniaux sont protégés pendant 50 ans à compter du 1er janvier suivant celle de l’interprétation pour les artistes-interprètes, de la 1ère fixation d’une séquence de son ou d’images animés pour les producteurs de phonogrammes et de vidéogrammes, de la première communication au public des programmes pour les organismes de radiodiffusion. » []
  4. Œuvres littéraires et artistiques dont le délai de protection est venu à expiration, généralement 70 ans après la mort de l’auteur. []
  5. SESAM, SACD, SACEM, SCAM ou SDRM par exemple []
  6. Toute édition d’écrits, de composition musicale, de dessin, de peinture ou de toute autre production, imprimée ou gravée en entier ou en partie, au mépris des lois et règlements relatifs à la propriété des auteurs, est une contrefaçon délictuelle. []

One Response to “Internet et droit de reproduction d’articles de journaux”

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    [Dossier relations presse] Les relations presse .. C'est aussi pour vous ! - NCN Comm'
    avril 28th, 2017 at 16:12

    […] Plutôt que de tout vous raconter .. Au risque de trop copier .. Je resterais dans les règles et vous propose de découvrir un article qui couvrent parfaitement le sujet à propos de la reproduction d’article de journaux. […]

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La Médiation Animale ? Telle est la question pour un grand nombre de personnes … Le but de cette pratique, en quelques mots, est la recherche des interactions positives issues de la mise en relation intentionnelle homme-animal. Elle est donc associée à une intentionnalité ... Lire la suite

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