Sandie Bélair mai - 11 - 2011
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Le 2 juillet prochain, l’Université Paris Descartes accueillera le Cercle d’Études Pluridisciplinaire des Interactions Homme-Animal (CEPIHA) dans le cadre de son premier colloque intitulé « L’animal dans le soin: entre théories et pratiques ». Ce colloque s’inscrit dans le cycle Minding Animals.

De nombreux site relaient déjà cette information mais pour ma part, j’ai souhaité lui donner une autre forme et présenter de manière un peu différente ce colloque afin de mettre davantage en valeur cette initiative. Pour cela je suis allée à la rencontre de Fabienne Delfour qui est à l’initiative du CEPIHA.

Fabienne Delfour est diplômée en Biologie du Comportement et Neurosciences Cognitives (DEA, univ. Toulouse III) et en Recherche Clinique en Psychomotricité (univ. Paris VI) et Dr ès Ethologie Cognitive, qualifiée aux fonctions de Maître de conférence en Neurosciences et en Biologie des Populations. Elle a créé la structure « Animaux et Compagnies » pour donner la parole à des professionnels reconnus dans le domaine du comportement animal, de sa psychologie et de la relation homme-animal. De son initiative est né le premier café-étho en 2009.

Fabienne nous présente donc le CEPIHA et son premier colloque!

De nombreuses initiatives voient le jour actuellement dans le domaine des interactions homme-animal. Le CEPIHA en est une. Pouvez-vous nous parler de ce projet? Qui en est l’initiateur et pourquoi?

Je suis à l’initiative de ce projet. Pourquoi ? Pour répondre à des attentes et à des demandes de personnes rencontrées lors des formations et des cours que je dispense, ou lors d’ateliers sur le thème de la thérapie assistée par l’animal que j’encadre. En les écoutant je me suis aperçue que de nombreuses personnes se retrouvaient très seules et désemparées à l’issu des formations qu’elles avaient suivies : désir de continuer à se former, envie de monter un projet en Interventions Assistées par l’Animal (IAA), difficulté à trouver des évaluations pertinentes, etc. Je ne pouvais répondre seule à leurs attentes. J’ai donc décidé de regrouper des personnes compétentes avec des expertises complémentaires et dont la motivation première est non seulement le respect des personnes bénéficiaires des IAA, mais également celui de l’animalité.

Quelles sont ses missions et qui le compose?

Les missions du CEPIHA sont triples : accompagner/étudier/communiquer.

  1. Accompagner : personnes et structures voulant développer les IAA ;
  2. Etudier ces pratiques
  3. Communiquer sur ces activités et nos résultats.

Les membres du CEPIHA sont les suivants (par ordre alphabétiques) :

– Mélanie Caritey (Psychologue et Master 2 d’éthologie appliquée, Univ. Paris 13),

– Fabienne Delfour (Dr ès éthologie cognitive, Univ Paris 5, dir. Animaux et Compagnies),

– Marie Maurer (Dr ès psychologie, Univ. Paris 5 ; post-doctorat Université de Sherbrooke, Canada)

– Stéphanie Michenaud (Master 2 Sciences Humaines Univ Nantes (en cours), comportementaliste),

– Catherine Ringuier (intervenante active, association « Parole de Chien », DU Relation Homme-Animal, Paris 5),

– Romy Sauvageot (Master 2 Ethologie appliquée, Univ. Paris 13 ; médiatrice homme/chien)

– Stéphane Tinnes Kraemer (Master conduite de projets et développement territorial, Univ Nancy2, comportementaliste)

Le CEPIHA a vocation de s’enrichir d’expertises diverses donc la liste des membres changera dans le futur.

Parmi ce groupe, peut-on trouver des personnes qui pratiquent sur le terrain en tant que professionnels les activités assistées par l’animal ou est-il composé essentiellement de chercheurs?

Votre formulation est intéressante « pratiquer sur le terrain en tant que professionnels les activités assistées par l’animal ». Nous sommes tous des professionnels combinant diplômes universitaires et pratiques de terrain, si c’est bien cela que vous entendez.

Mélanie Caritey et Romy Sauvageot ont obtenu leur master 2 d’éthologie en réalisant une étude des pratiques des Thérapies Assistées par l’Animal (TAA) sur des personnes âgées pour l’une et sur des personnes polyhandicapées pour l’autre. Romy Sauvageot est médiatrice de la relation homme-chien. Elle a effectué des suivis de personnes accompagnées de chiens visiteurs dans des hôpitaux et s’est initiée aux activités associant l’animal au sein d’instituts spécialisés au travers d’une formation courte.

Stéphanie Michenaud et Stéphane Tinnes Kraemer ont mis en place, depuis quatre ans, une association qui favorise le lien social au cours de promenades avec des chiens. Tous deux sont comportementalistes en activité et ils ont aussi une expérience professionnelle dans le parcours de formation des chiens guide d’aveugles et des chiens d’assistance.

Dr Marie Maurer travaille sur les fondements des TAA depuis une dizaine d’années et toutes deux avons participé et assisté à de nombreux programmes de delphinothérapie autour du monde.

Et enfin, Catherine Ringuier est bénévole depuis 8 ans dans des programmes d’accompagnement des personnes avec son chien.

C’est une richesse d’avoir des chercheurs dans le groupe qui puissent élaborer un questionnement scientifique et se baser sur du terrain.

Quelles sont les recherches en cours?

Dr  Marie Maurer et moi-même menons actuellement un travail de recherche sur la delphinothérapie et sur l’étude du tempérament de l’animal (chien et dauphin).

Pour tout vous dire, notre temps se consacre à la préparation des JIES où le CEPIHA fera des présentations orales et y animera un atelier autour des IAA. Mais c’est surtout la préparation de notre colloque qui est chronophage et énergivore.

Comment accompagnez-vous les structures désireuses de mettre en place des activités assistées par l’animal? Et qui est chargé d’un tel travail au sein de votre cercle? Etes-vous souvent sollicités?

Après un premier rendez-vous, nous établissons ensemble les besoins et les objectifs à tenir.

Chacun des membres du CEPIHA peut donc être sollicité sur son domaine d’expertise. Catherine Ringuier accompagne une jeune psychologue désireuse de se lancer dans une pratique des TAA. J’ai déjà eu 3 encadrements à fournir auprès de psychologues et d’éducateurs spécialisés qui s’intéressaient aux modifications comportementales d’enfants ou d’adolescents au cœur d’IAA. Nous accompagnons actuellement l’élaboration d’un projet éducatif et thérapeutique autour du chien, destiné à de jeunes adolescents.


 

L’intérêt pour les activités assistées par l’animal est très vif depuis ces dernières années; comme vous le dites très justement il semble nécessaire que cette pratique puisse être encadrée et évaluée. Comment proposez-vous de le faire et à partir de quelques réflexions?

Les évaluations existent mais sont malheureusement peu usitées aussi bien lorsqu’il s’agit de juger les bienfaits des pratiques pour l’homme que de déterminer les conséquences sur le bien-être de l’animal enrôlé dans ces interventions. La rencontre de disciplines complémentaires peut être un bon tremplin. Les membres du CEPIHA recourent à des méthodologies issues de la sociologie, la psychologie, l’éthologie, etc. Un des enjeux de notre colloque est d’en montrer la pertinence et le bien-fondé.

A la lecture du programme, nous avons l’impression que la pratique est peu représentée (heureusement Catherine est là avec sa grande expérience) et qu’elle ne concerne pas forcement l’animal dans « le soin » (thème du colloque), la famille est notamment évoquée (moi-même engagée depuis de nombreuses années dans la mise en place d’IAA auprès de familles et de parents, cela me mobilise particulièrement).

Le thème du colloque est « l’animal dans le soin : entre théories et pratiques ». Habituellement les colloques traitant des IAA/TAA énoncent et décrivent les bienfaits pour l’homme. J’ai personnellement l’impression d’entendre toujours les mêmes choses : à quel point c’est formidable pour l’homme d’être au contact de l’animal. Je force un peu le trait de cet anthropocentrisme… quoi que… Nous avons voulu prendre une autre perspective : celle de l’animal (comme le titre du colloque l’indique). Il y a donc 4 grands thèmes : qu’entendons-nous par l’animal dans le soin ? Quelles sont les évaluations possibles de ces pratiques ? Qu’en est-il du bien-être de l’animal ? Qu’en disent des personnes impliquées dans des interventions impliquant l’animal ? Seule cette dernière partie est la plus subjective. Les autres se nourrissent du terrain mais proposent des cadres et des concepts. Et enfin Dr V. Servais et moi-même clôturerons la journée par une synthèse.

Il nous semblait intéressant d’ouvrir le débat à d’autres animaux que le chien et le cheval et aussi montrer que la réflexion que nous allons mener sur cette journée peut s’appliquer à d’autres interactions interspécifiques. Par ailleurs, les TAA promulguent des bienfaits bio-psycho-sociaux. L’approche de l’animal dans la famille a donc toute sa place dans ce colloque.

Quel message souhaitez-vous faire passer avec ce premier colloque?

Les IAA ont besoin d’être inter-disciplinaires mais attention au choix des disciplines. Je prendrai un exemple que je connais bien celui de l’éthologie. Tout le monde est à peu près d’accord pour dire que c’est important d’avoir une étude du comportement mais très peu de personnes sont capables d’en distinguer les différents courants et donc de construire les ponts interdisciplinaires solides et cohérents. Ils font du comportement mais pas de l’éthologie ! Les conséquences de ce manquement sont pourtant très importantes : qu’il s’agisse de la considération de la personne prise en charge ou du statut accordé à l’animal. L’intérêt pour le comportement animal ne doit pas uniquement servir à crédibiliser une pratique. On peut aussi s’interroger sur (l’absence de) la réglementation des IAA. Un autre thème récurrent est l’anthropomorphisme : mal compris il est souvent banni mais pour de mauvaises raisons.

J’espère que ces questions émergeront lors du colloque afin que nous puissions les développer. Florence Burgat, Véronique Servais et moi-même y sommes particulièrement sensibles.

Ce colloque s’inscrit dans le cycle d’événements scientifiques préparant la conférence internationale Minding Animals. Pouvez-vous nous parler de cet événement?

Il s’agit d’un événement international qui traite de notre relation à l’animal. Toutes les informations peuvent être trouvées ici : http://www.mindinganimals.com//

 

 

Votre groupe sera t-il représenté?

En proposant un colloque sur les TAA, le CEPIHA s’inscrit dans ce cycle d’évènements scientifiques internationaux.

Quel(s) thème(s) allez-vous proposer?

Le CEPIHA discutera des TAA, des mécanismes et des concepts sous-jacents.

J’ai également participé à un autre évènement parrainé par Minding Animals et organisé par Animind: il s’agissait d’un week-end consacré à une réflexion sur le thème suivant « Sommes-nous prêts à élargir notre considération aux animaux ? ». J’y ai expliqué abondamment l’éthologie constructiviste, l’umwelt de l’animal et leurs conséquences pour la considération du bien-être animal.

Souhaitez-vous ajouter autre chose?

Je trouve intéressant et stimulant de pouvoir contribuer à l’évolution des IAA. Je souhaite que le CEPIHA remplisse ses missions d’accompagnement, d’étude et d’information afin que l’on puisse comprendre les enjeux non seulement psychologiques, sociaux et physiologiques mais aussi éthologiques et éthiques de ces interventions, et ce pour les sujets humains et animaux ! La devise d’Animaux-et-compagnies est depuis toujours «connaître pour mieux comprendre et respecter », elle s’applique ici aussi.

Je souhaite un grand succès à ce premier événement. Bravo à toute l’équipe et bonne continuation!

Je vous remercie. RDV le 2 Juillet !

Pour en savoir plus:

De nombreuses informations se trouvent sur les sites du CEPIHA et de Animaux et Compagnies

Le programme du colloque du 2 juillet 2011 et la fiche d’inscription au colloque: ici.

Sandie BELAIR

One Response to “Le 1er colloque du Cercle d’Etudes Pluridisciplinaire des Interactions Homme-Animal – Interview de Fabienne Delfour!”

    avatar
    Rachel DENNINGER
    juin 9th, 2011 at 19:40

    Chronophage et énergivore!!!!!!!…..l’organisation d’un colloque!!
    Ah bon?????….
    J’adore ces qualificatifs, et adhére complétement à cette assertion qui me rappelle de vieux souvenirs.Deux colloques organisés en Lorraine en 2008 et 2009: et puis STOP, MALHEUREUSEMENT, pour les raisons si bien décrites par Fabienne. Alors quelle joie de voir que d’autres prennent aussi cette initiative.La Fondation Sommer le 27juin et puis vous le 2 juillet.
    L’aspect de l’évaluation m’intéresse également fortement et je trouve aussi que votre programme s’inscrit dans une bonne complémentarité de ce qui se fait ou s’est déjà fait.
    Alors, je serai là le 2!!!!et vous souhaite bien sincèrement un vif succés.
    Rachel.

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