Cécile Banos mai - 4 - 2018
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Pour mon premier billet sur le blog de La Médiation Animale, je souhaitais parler…  Résilience !

Sur le site de notre association, nous pouvons lire : Résilienfance = Résilience + Lien + Enfance. C’est exactement de cela dont nous a parlé Boris Cyrulnik, il y a quelques semaines ( les 22 et 23 février derniers) à l’Institut Petite Enfance de Paris.

 

 
Institut Petite Enfance B Cyrulnick - - Résilienfance Bordeaux Médiation Animale

 

N’étant pas thérapeute, je ne vais pas m’aventurer dans les concepts théoriques mais je souhaiterais partager avec vous quelques réflexions autour des liens que nous pourrions faire avec notre pratique de Médiation Animale. J’ai découvert avec plaisir que nous étions quelques praticiennes à être présentes durant ces 2 jours, preuve, s’il en fallait, que l’Animal au cœur de notre pratique a un rôle essentiel à jouer.

Boris Cyrulnik est un raconteur d’histoires passionné et enthousiasmant qui nous a narré les débuts de sa carrière et de son engagement dans les théories autour des concepts de résilience venus des pays anglo-saxons. Il nous a rappelé que l’histoire des idées philosophiques ou scientifiques s’inscrit toujours dans un contexte et une temporalité. Nous ne pouvons que faire le parallèle, me semble t-il avec l’évolution des représentations autour de l’Animal. Boris Cyrulnik  a insisté sur l’engagement, l’humilité et la conviction qu’il faut pour faire cheminer et évoluer les idées mais aussi, et selon lui ce serait fondamental, la nécessité de démontrer scientifiquement ces idées. Aujourd’hui, dit-il,  « le concept  de résilience entre dans la culture avec de moins en moins de contre-sens et de contre-science » !

Bien qu’il reste à faire beaucoup tant au sujet de la compréhension du monde Animal, du respect et de notre savoir sur le vivre ensemble, il me semble qu’aujourd’hui les portes sont ouvertes pour faire avancer ces idées ! Alors, écrivons, témoignons et associons-nous, praticiens œuvrant dans le champs de la Relation Homme – Animal  et chercheurs, pour démontrer toute la richesse et la pertinence de ces interactions dans le respect de chacun.

 

Livre Revolutions animales Résilienfance Médiation Animale Bordeaux Blog
 

 

La résilience est définie comme  : C’est un « processus biologique, psychoaffectif, social et culturel qui permet un néo-développement après un trauma psychique ».

Pour les chercheurs-praticiens, comme aime à se définir Boris Cyrulnik, ce n’est plus les manques, les carences, « la résignation » qui organise les observations mais « la recherche de ressources internes qui fonctionnent encore dans l’âme du blessé ». Il ajoute : « lorsque l’on parle de résilience, on parle surtout de fracas et de trauma mais pas assez de pourquoi ils se remettent à vivre ». 

Je ne peux m’empêcher de penser à la Médiation Animale, qui bien souvent permet cette mise en mouvement psychique et qui met en lumière les ressources et les capacités restantes du bénéficiaire. Boris Cyrulnik parle du changement  fondamental de la posture des professionnels, il est nécessaire selon lui de déplacer notre regard du côté des potentialités créatives et de la mobilisation, chez tout individu, de ses propres ressources.

 

 

Il me semble que c’est dans cette démarche que s’inscrit la relation d’aide (qu’elle soit thérapeutique, éducative ou pédagogique) assistée par l’Animal. Résilienfance, dans sa proposition de définition élaborée lors de ses groupes de travail précise que « la Médiation Animale appartient à un nouveau champ disciplinaire spécifique, celui des interactions Homme-Animal, au bénéfice de chacun d’eux, l’un apportant ses ressources à l’autre. ».  Cette mise en relation intentionnelle de l’Homme et l’Animal s’ancre dans une recherche d’interactions accordées et qualifiées de positive.

Très engagé dans la discipline de l’éthologie humaine, Boris Cyrulnik ne cesse de faire des ponts entre les espèces et s’appuie sur ce que partagent nombre d’entre elles, à savoir  la nécessité du lien et de l’attachement.

 

Sous le signe du lien - B Cyrulnick - Résilienfance Bordeaux Médiation Animale
 

Comme l’écrit Claude Béata, vétérinaire et ayant collaboré avec Boris Cyrulnik : «  L’attachement n’est pas un choix. C’est un moteur, une force vitale qui oriente toute la vie des individus et sa recherche de proximité ». (BEATA, Claude, Au risque d’aimer, éditions Odile Jacob, 2013, P 23).

L’attachement est un concept fondamental défendu par Boris Cyrulnik qui le décrit comme « se manifestant par un désir de proximité qui permet le tissage d’un lien affectif durable ». Ce style affectif extrêmement précoce , dit-il,  dépend de l’organisation de la niche sensorielle qui l’entoure. Des les premiers mois, l’enfant va se faire une «représentation mentale du style relationnel qu’il attend de ses donneurs de soin ». A l’aide de ses figures d’attachement, l’enfant va acquérir des aptitudes affectives et relationnelles plus ou moins sécures.

Comme tous les mammifères supérieurs, nous partageons ce besoin de nous attacher, de nous lier à l’autre, de rechercher la sécurité. Nous évoluerions, et ce dès notre vie intra-utérine (Boris Cyrulnik nous  parle de l’importance de la 27e semaine au 20 mois du bébé), dans cet sorte de nid sensoriel et protecteur, puis progressivement, attaché et sécurisé, nous pourrions partir explorer ce qui nous entoure.

Aujourd’hui,  le monde émotionnel et « ce nouveau continent de l’affectivité », comme le nomme Claude Béata, sont au centre de bien des recherches dans le domaine de l’éthologie ou des neurosciences. En tant que praticiens de la Médiation Animale, nous ne pouvons que témoigner de l’importance de cette passerelle, qui lors des séances de Médiation Animale permet  l’accordage.

Boris Cyrulnik lors de ce séminaire  a insisté sur une autre idée phare : « on ne devient pas résilient tout seul,  la résilience s’étayant sur la relation à l’Autre ». Cet autre peut évoluer dans l’entourage familial, scolaire, social de l’enfant mais peut être (et est bien souvent), l’Animal familier de la maison.

Nous savons et sommes convaincus que l’Animal peut être précieux dans une fonction de sécurisation affective et une fonction de médiation de parole. L’Animal de par sa présence bienveillante, non jugeante, est un précieux allié pour le professionnel de la relation d’aide assisté par l’Animal. En effet Boris Cyrulnik nous rappelle l’importance de la parole libérée après un trauma… Mais cette libération de la parole ne peut se faire n’importe comment, n’importe quand et avec n’importe qui, au risque, rappelle t-il de libérer une parole qui n’élabore pas une nouvelle représentation des faits mais qui peut enkyster une blessure traumatique : « Répéter l’histoire, sans remanier le malheur que l’on a subi, c’est aggraver la mémoire traumatique, c’est aggraver la souffrance ». La parole se doit d’être libérée dans un espace sécurisant, un lien d’attachement et de confiance où l’enfant va sentir que l’Autre est désireux d’entrer dans son monde, Boris Cyrulnik ajoute que la parole n’a pas qu’une fonction informative mais aussi une fonction affective.

Au cours de ces deux jours, il nous a certes parlé des traumas aigus liées aux guerres, aux actes de terrorisme, aux agressions mais a insisté longuement sur les traumas qu’il appelle « traumas développementaux et chroniques », traumas longs et difficiles à détecter et que l’on retrouverait chez les enfants, par exemple, confiés aux services de protection de l’enfance et autres institutions spécialisées. Ces enfants pouvant être victimes de négligences et de carences affectives,  pouvant être touchés émotionnellement, terrorisés, discrédités par des figures d’attachement qui auraient du être sécurisantes présenteraient une altération du cerveau (mise en évidence par imagerie médicale) liée à une sécrétion trop importante de l’hormone de stress et qui serait résiliable. Ces enfants, touchés dans leur représentation de soi ( « je suis ce que tu me dis »), comme le souligne Boris Cyrulnik , sont dans un lien à l’Autre malmenant et malmené. Lors de nos ateliers, nous pouvons souvent observer que ces enfants expérimentent un autre type de lien à l‘Animal qui va être sécurisant, évolutif, positif et sur lequel ils vont et nous allons pouvoir nous appuyer. L’Animal au sein de notre approche tryadique de médiation a toute sa place auprès d’un professionnel compétent pour aider à la libération d’une parole mais aussi pour nourrir, stimuler et renforcer cette niche sensorielle qui a pu être appauvrie.

Je souhaiterais conclure mes quelques réflexions par un dernier éclairage de Boris Cyrulnik qui nous dit que non seulement la résilience serait un travail de développement qui ne cesse pas mais que chaque histoire est faite d’une constellation de déterminants. Il nous encourage à ne pas être réductionniste, à renoncer aux causalités linéaires pour être attentifs aux variables cachées et multiples. Selon lui, dans ce processus de résilience, « chaque nœud de la couture qui est défait compte ». Cela sous-entend un travail de relation d’aide que l’on pourrait  qualifié de travail de fourmi : pas à pas, pas à pattes et main dans la main, nous œuvrons ensemble auprès de ces enfants, adultes et séniors qui s’aventurent dans ce processus de résilience. 

Cécile BANOS

 

 

4 Responses to “Retour sur un séminaire: « La Résilience par B. Cyrulnik… »”

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    martaux
    mai 6th, 2018 at 7:07

    merci pour ces infos, toujours un plaisir de faire du lien ! avec le travail de Boris C

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    Sandie Bélair
    mai 7th, 2018 at 22:10

    Merci Cécile pour cet article et ces notions si chères à moi et Resilienfance!

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    Sandra Massy
    mai 11th, 2018 at 13:09

    Merci pour cet article, qui repose bien le concept de résilience et quelle chance d’avoir pu profiter d’un séminaire avec B. Cyrulnik !!!

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    Yasmine
    mai 23rd, 2018 at 7:55

    Superbe article Cécile sur un sujet très loin d’être simple ! Merci !

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