Sandra Massy avril - 14 - 2020
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En été 2019, j’ai eu la chance de m’envoler en Mongolie. Direction LE pays du cheval et un voyage de trois semaines avec deux randonnées à cheval afin de découvrir cet immense pays au rythme des sabots et aux côtés des éleveurs nomades.

En décollant de Genève, puis de Moscou, je ne sais pas vraiment à quoi je m’attendais. La première rencontre avec les chevaux mongols s’est faite dans le camp des éleveurs nomades qui allaient nous accompagner. Nous venions de passer une nuit peu reposante à chercher le sommeil sur un lit en bois en essayant de ne pas trop cogiter sur ce qui allait se présenter le lendemain et le temps était incertain.

 

© Photo Sandra Massy

 

Nous avons découvert au matin les montures avec lesquelles nous allions randonner 8 jours durant : il y avait des chevaux en liberté tout autour du campement de yourtes et une quinzaine d’entre eux étaient enfermés dans un enclos en bois, l’air franchement pas content d’être là.
Ces chevaux mongols « appartiennent » à des éleveurs mais leur vraie vie est en liberté dans la steppe. Lorsque les éleveurs en ont besoin, ils partent à leur recherche et ils en ramènent un certain nombre, le temps d’effectuer un travail puis ils les relâchent.

Petite parenthèse sur les terres mongoles… la terre est propriété de L’État et personne n’est le propriétaire d’un terrain (sauf aux alentours d’Oulan Bator, où les quelques mètres autour des yourtes appartiennent aux habitants). Le reste de la Mongolie est à tout le monde et les nomades paient un droit de faire paître leur bétail à l’état. Chacun est libre de se poser où il veut, avec sa yourte ou sa tente.
Les troupeaux immenses de chevaux, de yacks, de chèvres et de moutons vivent en totale liberté et ce sont les hommes qui suivent les animaux, qui eux suivent leur instinct et leurs besoins en bougeant au gré de l’eau et de la nourriture à disposition.
Il faut aussi que je précise que la Mongolie est un pays d’altitude, où tout se situe entre 1500 et 4000 mètres, ce qui fait que la nourriture pour les herbivores est plutôt pauvre.

 

© Photo Sandra Massy

 

Mais revenons à la quinzaine de chevaux qui se trouvait dans cet enclos et qui trouvait que la liberté leur manquait déjà… Il y avait les enfants des éleveurs et les éleveurs qui essayaient de les attraper au lasso et c’était plutôt rodéo.
A ce moment, dans ma tête se bousculent des pensées telles que : suis-je une assez bonne cavalière ? on est vraiment au milieu de nulle part ! quelle idée saugrenue de venir ici monter des chevaux semi-sauvages, etc…
Puis les éleveurs ont fait diversion avec un enfant qui débourrait un jeune cheval et je me suis retrouvée avec un éleveur qui m’a présenté ma monture, un petit cheval compact pie, le regard franc. Il m’invite à monter et ni une ni deux me voilà en selle sur une selle de l’armée russe, qui comme son nom l’indique, n’est pas l’objet le plus confortable du monde, mais qui avait le mérite d’être chaussé de longs étriers pour cavaliers européens et d’avoir un coussin déplaçable, ce qui veut dire qu’après plusieurs essais, nous avons fini par nous entendre, cette selle russe et moi.

Deuxième petite parenthèse, les chevaux n’ont pas de nom en Mongolie. Ils sont nommés d’après leur robe afin de les différencier. En échangeant avec les éleveurs, ils les connaissent parfaitement, ils savent raconter leur lignée, leur âge, mais ils n’ont pas de nom, au même titre que le reste des troupeaux qui comprennent les yacks, les chèvres, les moutons et les chameaux par endroit. Cela fait plusieurs centaines d’animaux pour chaque famille d’éleveur.
Nous avons en bon cavaliers européens, nommé nos montures avec mes amis voyageurs… ma monture s’est prénommée « Copain » pendant notre randonnée. Cela faisait rire les éleveurs mais ils regardaient cela avec un œil bon enfant.

 

© Photo Sandra Massy

 

Bon, une fois en selle sur Copain me voilà en train d’essayer de bien me rappeler les instructions de l’agence de voyage sur les consignes à respecter sous peine d’incompréhension gênante avec ma monture, qui n’a pas subi des années de manège avec option équitation classique comme moi, pas plus qu’elle n’a eu vent des galops éthologiques passés par la suite…
Les recommandations étaient de ne pas utiliser les jambes mais de dire « tchou » d’un air convaincu (et là j’ai vite constaté avec mes amis que le cheval mongol est tout aussi malin que les chevaux de manège de par chez nous, à savoir qu’il sait très bien qui parle et que mes tchou étaient suivis d’une très légère mise en avant alors que si un des guide éleveur arrivait et lançait son Tchou à lui, là une accélération fulgurante naissait sous les sabots de ma monture…).
Utiliser uniquement des rênes d’appui et utiliser le poids du corps pour freiner. Ne jamais dépasser le guide, ne pas se mettre en suspension mais légèrement en l’air. Ne pas se pencher en avant, ne pas enlever son manteau. Ne pas monter ou descendre sans être tenu par un éleveur…et là ressurgissent les idées du genre mais finalement pourquoi je suis là en selle sur cette bête semi sauvage ???

 

© Photo Sandra Massy

 

Mais pour couper court à mes moults questionnements, nous voilà partis du milieu de nulle part en direction de nulle part, au pas puis au petit trot et finalement au premier galop.
Il n’y a en Mongolie que quelques routes goudronnées qui relient la capitale aux principales villes des différentes province et ensuite c’est la steppe et des pistes…Nous n’avons vu que peu d’indications routières pour arriver chez les éleveurs donc à partir de là, confiance totale en nos guides qui connaissent chaque brin d’herbe et chaque caillou de leur partie de la Mongolie. Le soir, lors des campements, ils ont pu me montrer sur la carte de notre guide touristique, où nous étions passés…
Nous faisons gentiment connaissance de nos montures et j’ai eu dès le début un sentiment de totale confiance en mon cheval. La steppe mongole, sur les plateaux de l’Arkanghai où nous avons fait notre première randonnée est truffée de trous de marmottes et de trous d’écureuil des steppes… Ma monture était très équilibrée et petite par rapport à nos montures européennes, mais il était d’une stabilité incroyable. Son équilibre était très clairement horizontal et quel que soit le terrain, montée ou descente, il gardait les mêmes foulées et son équilibre et ce à toutes les allures.
Nous avons rencontré des troupeaux inconnus, des chevaux qui nous ont appelés, rencontrés des trucs potentiellement bien plus effrayants comme des plastiques ou d’autres déchets posés au milieu de nulle part, nous avons traversé des villes avec des voitures/motos, rien n’a fait frémir ma vaillante monture.

Et comme les chevaux sont chez eux partout en Mongolie, il n’y a pas de montures qui collent ou qui veulent rentrer à la maison. Ils sont aussi taillés et sélectionnés pour la course car le sport national (outre la lutte entre hommes) c’est les courses de chevaux. J’ai donc eu l’occasion de filer à une vitesse incroyable sur ce petit cheval dans des espaces vastes comme je pense que peu de pays en ont encore, au rythme des sabots. Quel sentiment de liberté totale !

 

© Photo Sandra Massy

 

Nous avons aussi eu la chance de dormir dehors pendant 3 semaines, ce qui fait que la réacclimatation à la maison fût difficile (nous avons planté la tente devant nos chevaux de retour à la maison…).
J’ai aussi eu le sentiment, dans cet immense pays qu’est la Mongolie, que les différents habitants sont égaux. Je veux dire par là que les conditions de vie sont dures pour tout le monde dans la steppe. Pour les hommes et pour les animaux. Mais chaque vie est respectée et est « égale ». On vit le fait que les animaux sont à bien des égards mieux adaptés que l’homme… mais ils collaborent avec ce dernier, en donnant leur lait pour les yacks, moutons et chèvres (et par endroit les juments aussi), contre une certaine protection. Les animaux donnent leur viande aussi mais tout est prélevé dans un souci d’équilibre. Ils sont intimement reliés, en conscience. Chacun a sa place et permet aux autres d’avoir la sienne.
Parfois l’équilibre se rompt et les éleveurs sont contraints d’aller en ville et là la magie disparaît.

 

© Photo Sandra Massy

 

En conséquence je suis contente d’avoir été randonner à cheval là-bas parce que l’argent perçu des voyageurs permet à ces éleveurs d’avoir un revenu supplémentaire afin de faire face aux coups durs qui peuvent arriver (maladie, météo,…)
Et je garde en moi le rythme de ces galops infinis, entre ciel et terre, survolant la steppe grâce à ma monture pie, qui aimait tellement gagner les courses…

Sandra Massy

 

+++ Sur le même thème

Les billets relatifs au voyage de Résilienfance en Mongolie avec 10 enfants en juillet 2009:

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Le retour des steppes

 

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