Sandie Bélair novembre - 9 - 2018
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Nous savons qu’une reconnaissance de la pratique (la médiation animale en général) passera d’abord par une fédération des acteurs (plus facile à dire qu’à faire…) puis par une réglementation avec ses points positifs (corriger quelques aberrations, protéger les bénéficiaires et les animaux impliqués, instaurer des formations si possible avec des praticiens et pas seulement avec des universitaires qui connaissent la MA que dans les livres… ) et ses points négatifs ( le risque à trop vouloir uniformiser et contrôler c’est de perdre l’âme d’une pratique et n’oublions que la nôtre se fonde sur le vivant, sur la rencontre entre plusieurs subjectivités… par exemple ne devrions-nous pas être vigilants quant à la sélection et la formation des animaux de médiation? A trop vouloir qu’ils répondent à un « standard », à une aptitude « idéale » ne risquons nous pas de perdre leur spontanéité, tout ce qui fait la richesse de leur présence?…). Ceci dit, ici, sur ce blog, on se prononce pour une réglementation mais avec toutes les réserves que cela comporte.

Il y a quelques semaines sur sa page facebook, la FFE (Fédération Française d’Équitation) annonçait une formation en médiation équine à destination des professionnels du soin/du médico-social et des professionnels du monde équestre. On ne va pas se mentir… ledit post a suscité de vives réactions dans le milieu et réveillent les vieilles querelles autour de: qui fait quoi et comment? D’autant plus que la formation n’étant pas finalisée, cette annonce manquait de précisions.

La nébuleuse qui entoure la pratique et la difficulté des acteurs principaux à se fédérer n’aident pas à la fameuse reconnaissance auprès des décideurs et des instances. Avec 630 000 licenciés, la FFE est un acteur de poids qui entre, aujourd’hui, plus concrètement, dans l’équation avec l’ambition de réunir l’ensemble des praticiens et des filières concernées. Cette formation annoncée par la FFE est-elle les prémices d’une professionnalisation et d’une réglementation? L’avenir nous le dira… En attendant, Carole YVON, chargée de mission Cheval et Diversité pour la FFE, répond à nos questions! Merci Carole pour cet échange et bonne continuation dans ce travail!


En préambule, sachez que j’ai construit ces questions sur les diverses et nombreuses réactions que j’ai reçu suite à l’annonce de la FFE et sur mes propres interrogations. Bonne lecture.

Pouvez-vous vous présenter SVP Carole et nous parler de « Cheval et Diversité » qui est un service de la FFE (Fédération Française d’Équitation) ? Depuis combien de temps existe-t-il ? Quelle est sa mission ?

Responsable du service, la FFE m’a confié les missions « cheval, handicap, soin et inclusion ». Cadre de Santé possédant 20 ans d’expérience du soin et du médico-social, allant de la fonction d’infirmière, de formatrice, et de manager des organisations de différentes unités, je suis également formée à la Thérapie Avec Cheval.

Le service Cheval et Diversité a été créé en 2017 suite aux premières assises nationales organisées par le FFE réunissant à parité des professionnels équestres et soignants. Les missions du service ont été fixées en lien avec les demandes exprimées, à savoir l’accompagnement de tous les acteurs des différents champs, en terme de mise en réseau, structuration, valorisation, développement des activités et des compétences pour les publics spécifiques.

Le service regroupe différentes compétences professionnelles en lien avec les activités équestres et de soin. Il s’appuie également sur l’ensemble des services fédéraux : formation, qualité, club, communication, ainsi que sur la Direction Technique Nationale.

 

© FFE

 

Plus concrètement sur le terrain quel est le rôle de « Cheval et Diversité » auprès des praticiens, des bénéficiaires et des équidés ?

Le rôle de Cheval et Diversité est à la fois dans l’accompagnement de proximité individualisé mais aussi un accompagnement national des pratiques. Concrètement nous rencontrons les différents acteurs de proximité (professionnels équestres et médicaux, paramédicaux et médico-social) et institutions (Direction d’établissements, ARS, Fédération de Santé, délégué ministériel…) pour accompagner, structurer et promouvoir les activités. Outre ces rencontres et projets communs, nous construisons différents outils d’aide au développement des activités : formation, convention, adhésion. En effet nous avons en septembre créé une adhésion spécifique aux établissements sanitaire et médico-sociaux afin de fédérer et travailler avec l’ensemble des acteurs mais aussi de pouvoir recenser et valoriser les activités.

Vous avez annoncé fin septembre le lancement de votre programme de formation Médiation avec les Equidés (MAE) qui délivre un diplôme fédéral de médiateur équin. Quatre grands organismes de formation existent déjà, pourquoi lancer à votre tour une formation ? Que va-t-elle apporter ? Va-t-elle s’ajouter aux autres ? Être complémentaire ? Mutualiser des compétences ?

Fédératrice la FFE souhaite renforcer la complémentarité et les compétences des activités avec les équidés. La formation MAE s’inscrit totalement dans la dynamique de rapprochement des acteurs dans un environnement où chaque champ de compétence est identifié, reconnu et peut agir avec efficience. La FFE possède cette force permettant de se centrer sur la valorisation des activités et des compétences et de dépasser ainsi l’état concurrentiel existant.

L’annonce de votre formation a été soudaine, d’autant plus que le contenu et l’organisation ne sont pas connus. Elle suscite donc beaucoup d’interrogations.
Pouvez-vous nous présenter, plus précisément, votre formation SVP (organisation, modules, nombre d’heures, condition d’admission, coût, formateurs etc…)?

La FFE travaille sur ce projet depuis les assises nationales. Comme je vous l’ai indiqué, la demande, des professionnels des différents champs, concernée également l’accompagnement en terme de formation. Nous avons donc élaboré cette formation en correspondance aux besoins identifiés du terrain, notamment le renforcement des compétences, le rapprochement des acteurs. De ce fait la formation est construite en intégrant non seulement la diversité des acteurs mais surtout l’indispensable complémentarité. Elle comporte 6 modules. 4 communs et 2 spécifiques au champ professionnel initial et par conséquent à la mention correspondante au projet professionnel.

Concernant l’organisation concrète, elle est en court de finalisation. La première aura lieu au parc fédéral de Lamotte Beuvron. C’est une formation de 456h ( dont 175h de stage) en discontinue répartie sur 18 mois. Les  éléments complémentaires seront communiqués le plus rapidement possible.

Au niveau équestre, certains organismes demandent un galop 5. Nous pouvons penser qu’une formation portée par la FFE demande un niveau plus élevé pour les professionnels du soin et du médico-social. Est-ce que cela sera le cas dans la formation proposée par « Cheval et Diversité » ? Inversement, est-ce qu’un certain niveau en psychologie et psychopathologie avant intégration au sein de votre formation sera demandé aux professionnels équestres ? En effet, on pourrait vous opposer que si leur but n’est pas de faire de la thérapie, le but des soignants n’est pas de faire de l’enseignement.

Le niveau galop 5 n’est pas exigé dans l’ensemble des organismes de formation. Il correspond à un niveau de pratique équestre. Pour la FFE, il est primordial de développer un niveau de compétences en rapport avec l’utilisation des chevaux permettant de garantir la sécurité des personnes vulnérables accueillies. Au même titre, notre volonté, en lien avec la demande des professionnels équestres, est de développer leurs connaissances et compréhensions des personnes (bénéficiaires, accompagnants, encadrants, soignants…) afin d’adapter et de personnaliser l’offre. La pierre angulaire est réellement la mise en action de la complémentarité, d’où notre formation commune dans laquelle chacun conserve ses prérogatives et son champ de compétences.

Un module sur la formation et le bien-être des chevaux de médiation est-il prévu? Si oui, comment cela sera t-il abordé?

Oui la formation et le bien être des équidés font inévitablement partis des contenus de la formation. Ils seront abordés sous différents angles par les intervenants experts, à partir d’enseignements théoriques et pratiques.

 

© FFE

 

Comme vous me l’avez précisé, une fédération est là pour fédérer, rassembler et permettre la valorisation d’une activité. Ainsi, là encore, on peut penser qu’une fédération telle que la vôtre a beaucoup de poids pour travailler à la réglementation de ladite activité. Est-ce que le but à moyen ou long terme de la FFE est de proposer et de participer à cela? Et si oui, que deviendront les professionnels qui ne détiennent pas votre diplôme mais celui d’un des quatre organismes? Pourront-ils continuer à exercer ? Est-ce qu’il existera des équivalences ?

Comme indiqué précédemment, la FFE se veut et est fédératrice. La démarche Cheval et Diversité est aussi une démarche qualité qui oriente ses actions dans une dynamique inclusive et non exclusive. Fédérer c’est rassembler autour de compétences et d’actions communes l’ensemble des acteurs.

Enfin, par rapport au marché, aux besoins et aux demandes, pensez-vous que l’activité de médiation équine au sens très large est porteuse d’emplois non précaires et qu’elle peut s’exercer à temps-plein étant donné l’investissement qu’elle demande pour les professionnels et les animaux ?

Les activités avec les équidés demandent effectivement des investissements humains et matériels conséquents. Les clubs et professionnels équestres s’impliquent depuis de nombreuses années dans le développement des activités pour tous. Par la diversité des activités proposées, ils constituent un étayage, ancré sur le territoire, sur lequel l’ensemble des professionnels soignants peuvent s’appuyer. Nous sommes convaincus que la complémentarité et l’interdisciplinarité sont les maîtres mots. Elles garantiront le développement des pratiques de médiations avec les équidés dans une dynamique de qualité, à la hauteur des besoins des personnes en demandes.

Le mot de la fin est pour vous…

Pour terminer, je reprends les mots de ma collègue, Fanny Delaval, CTN en charge du Para Dressage et des disciplines Para équestres, en conclusion de l’Equimeeting d’Hennebont. Ils reflètent le sens de la démarche fédérale Cheval et Diversité :

« Trois points clefs :

  • Le premier est que nos équidés offrent un important panel de possibilités d’approches pour : accompagner, aider, soigner, l’autre…les autres. Il est cependant important de ne pas oublier de leur procurer en retour, les conditions de vie et les soins qu’ils méritent.
  • Le second est qu’au-delà d’un choix personnel de cursus de formation c’est bien au final la compétence qui prime. »l’on ne fait bien que ce que l’on sait faire ».
  • Le troisième et dernier point est que sortir d’un état d’esprit concurrentiel permettrait aux différents organismes représentés ici d’avoir davantage de reconnaissance auprès des organismes de tutelles. La Fédération Française d’Equitation, par le poids de ses 630 000 licenciés, peut très probablement incarner cette représentativité collégiale et militer pour la reconnaissance de la médiation équine. L’interdisciplinarité est une clef essentielle de l’efficacité. Elle permet de respecter les prérogatives légales de chacun et d’agir en sécurité, avec efficience et efficacité. 

Antoine de Saint-Exupéry, nous donne le chemin à poursuivre « Voyez-vous dans la vie, […], il n’y a pas de solutions, il y a des forces en marche : Il faut les créer et les solutions suivent » »

Vol de nuit p189 / Antoine de Saint-Exupéry. – Gallimard, 7 novembre 1972. – (Folio.) »

Sandie Bélair

En savoir plus sur Cheval et Diversité: https://www.ffe.com/club/Cheval-Diversite

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